DÉCORATION

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À Rio: Une maison dans la roche d’Arthur Casas.

SUR LES HAUTEURS DE RIO DE JANEIRO, CETTE MAISON SURGIT AU MILIEU D’UNE VÉGÉTATION LUXURIANTE, DONT ELLE EST UN MIROIR DE COULEURS ET DE MATÉRIAUX. ELLE S’OUVRE TOTALEMENT SUR LA BAIE DE LA CITÉ MERVEILLEUSE ET SON PAYSAGE PRODIGIEUX. SANS POUR AUTANT UTILISER TOUS LES LEVIERS DE L’ÉCOLOGIQUE OU DU DURABLE, LE STUDIO ARTHUR CASAS PLACE ICI L’ENVIRONNEMENT D’EXCEPTION AU CŒUR DU PROJET ARCHITECTURAL.

Comme un grand nombre de villes côtières, Rio de Janeiro a connu dans les années 1960 un phénomène d’urbanisation, favorisé par la présence de plages devenues rapidement de hauts lieux touristiques. Si Copacabana est aujourd’hui la plus célèbre, plusieurs dizaines d’autres existent, qui s’étendent notamment au sud de la ville où se situe São Conrado. Mitoyen de la favela Vidigal, ce quartier, depuis peu prisé des classes aisées, abrite le Gran Melia Nacional d’Oscar Niemeyer et de nombreuses villas. Celle-ci, propriété d’un jeune entrepreneur mondain, a été construite dès 2010, avec un double objectif: recevoir devant un panorama unique tout en bénéficiant d’une intimité totale.

Une maison-paysage
Trois ans de travaux furent nécessaires pour bâtir cette résidence de 485 mètres carrés, sur une propriété qui en compte le triple. Le cabinet d’architecte dut faire face à deux contraintes majeures: un terrain escarpé et la présence de plusieurs voisins.
La solution fut de surélever les espaces de réception au-dessus des murs délimitant le domaine. Ainsi haussées, même au premier étage, les pièces principales se trouvent immergées dans le paysage. Au troisième étage où se situent les appartements privés, l’effet en est d’autant accru. Leur accès a été travaillé pour en augmenter l’impression de révélation et de surprise. Depuis la rue, on entre dans la villa par une succession de petits chemins qui mènent à une galerie couverte précédant la porte principale. À mesure que l’on avance à l’intérieur, le panorama se dévoile, l’horizon, la mer et le fameux rocher granitique de Gavea, cerné par la forêt de Tijuca. Il est le seul élément de verticalité dans un paysage d’une superbe amplitude, que le plan horizontal de la villa cherche à embrasser à l’extrême; seuls quelques planeurs et parapentes viennent parfois en rompre la quiétude.
Les volumes intermédiaires sont comme suspendus, la charge ayant été portée sur l’escalier flottant en béton qui relie les deux premiers niveaux, et deux piliers en métal. Les échanges intérieur-extérieur sont privilégiés, depuis le salon notamment qui fonctionne à la façon d’une véranda. Les grandes baies vitrées s’étalent sans discontinuer d’une salle à l’autre, traversant le salon, la salle à manger, la cuisine et le balcon. Seule la piscine à débordement apparaît comme un élément à part, néanmoins transitoire entre l’architecture et le paysage, avant les murs comme au-delà. Dans l’enceinte, plusieurs espèces végétales exubérantes proviennent directement de la forêt de Tijuca. Adossée à la montagne, la villa s’exclut de l’urbanisme environnant par un plan d’ensemble subtil dont l’agencement et la décoration intérieure renforcent la signature environnementale.
Intérieur Do Brazil
De la pierre aux matériaux végétaux, tout est naturellement d’extraction locale. Seuls les objets de design s’en éloignent parfois, mais leur sobriété et leurs lignes franches ne brisent en rien l’unité générale. Du niveau le plus bas, où se situent les chambres d’invités et les pièces pour le personnel, aux chambres privées, en passant par le salon, il est une constante dans les matériaux qu’illustre à merveille le bois cumaru, autrement appelé tek brésilien, dont la densité et la couleur marron doré sont prisées.
Il recouvre le sol de la maison et se poursuit même sur le balcon. Sa résistance lui permet d’être utilisé au-dedans comme au-dehors. On le retrouve aussi dans l’escalier flottant dont une partie borde la salle à manger, à la différence de l’autre escalier, en béton, au ton similaire à la pierre de Carijó que l’on extrait non loin, dans l’État de Minas Gerais. La pierre a également été choisie pour les murs et pour les plafonds des deux premiers niveaux où, sous une forme apparente, elle dévoile une élégante couleur gris clair. La structure en bois de l’étage supérieur s’en distingue d’autant plus, soulignant une taille plus réduite et une fonction plus intime avec un bureau, la chambre maîtresse et une salle de bains comprenant un spa. L’ameublement privilégie le confort et une simplicité atteignant parfois à un minimalisme que l’on pourrait qualifier d’écologique. Les couleurs privilégiées suivent celles des matériaux naturels utilisés. La plupart des pièces sont d’origine brésilienne, ainsi du tapis en sisal ou de la table à manger dessinée par le studio Arthur Casas. Quelques objets ont été glanés à l’étranger, chinés dans des boutiques à New York par exemple. Parmi les luminaires, la lampe en trois gros néons surplombant la table à manger est une exception dans un espace où la lumière indirecte est privilégiée. Le design n’a rien de baroque ni de démonstratif, il s’efface derrière un environnement suffisamment évocateur et porteur de réalité et d’imaginaire esthétiques.

Cette résidence merveilleuse est représentative d’une certaine architecture contemporaine brésilienne. On n’échappe pas aux grandes tendances mondiales, celles positives, portées par une sensibilité au développement durable où l’habitat se construit en fonction de son environnement et non à son détriment ou simplement sans en tenir compte. Dans un pays où la nature offre une richesse unique, c’est a fortiori une règle d’or, à la condition que l’urbanisme reste contrôlé. La mode se singularise alors à travers une relecture locale forte, nourrie de paysages sublimes marqués par les grands espaces continentaux et marins.


Jim

 

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  • À Bkerzay, à Deir el-Qamar, la montagne hospitalière.

    Dans cette région, les pommes de pin poussent par paire sur les branches. D’où bi kerzayn, que Ramzi Salman a transformé en Bkerzay. Tel est le nom donné à ce projet humain, écologique et artistique que le promoteur a conçu au milieu des pins sauvages.

    Le pin sera bien au cœur du projet Bkerzay, tout comme ses acolytes sylvestres et cette végétation méditerranéenne qui tient tant à cœur à Ramzi Salman, promoteur et concepteur de cette initiative, tout comme l’architecture libanaise et ce qu’il appelle «le charme du Levant».

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