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Dans le regard de Fadia Ahmad, Nabil Nahas et la peinture fractale.

Si Fadia Ahmad a un temps envisagé d’entreprendre des études de droit, c’est finalement le monde de l’art qui l’a happée pour en faire l’une des photographes les plus en vue de sa génération. Elle expose dès la rentrée à Beit Beirut des photos réalisées dans les moindres recoins de la capitale libanaise. Des images sans filtre, à tous points de vue.

 

 

L’Art comme rempart contre l’incompréhension d’un système socio-politique trop complexe à appréhender par une jeune fille de 17 ans. C’est l’âge de Fadia Ahmad lorsqu’elle découvre pour la première fois le pays du Cèdre en 1991. Cette Libanaise née à Alicante et ayant grandi entre l’Espagne et le Zaïre découvre alors un Beyrouth meurtri, couvert de cicatrices mais vivant: immeubles éventrés, façades criblées de balles… De cette découverte est née une première série de photos beyrouthines dont la majorité sont aujourd’hui disparues, victimes des bombardements israéliens de 2006.

Un épisode dramatique qui ne fait que décupler la volonté de Fadia Ahmad de poursuivre son exploration photographique, une véritable expédition dans les rues de la capitale qui prend la forme d’un pèlerinage: 10 452 km parcourus par la photographe selon un itinéraire bien précis qui n’omet aucun un recoin de la ville. Pourquoi précisément 10 452 km? Un chiffre qui correspond à la superficie du Liban!

 

Sont nés de cette longue promenade des «fragments d’une ville» tels que Fadia aime à les qualifier. Des tranches de vies aussi, fixées à jamais sur des clichés que l’artiste appelle «mes tableaux». Ces derniers dévoilent un Beyrouth fier avec ses immeubles Art déco ressuscités et d’autres restés dans leur jus, des carcasses de wagons, un enchevêtrement de fils électriques qui en disent long sur la pénurie d’électricité comme sur l’anarchie des connections sauvages. Des photos sans filtre, absolument pas édulcorées mais qui respirent la poésie. Une quête de la beauté que ce soit à travers un coucher de soleil flamboyant ou une vue plongeante sur un tandem de pêcheurs assis devant une mer jonchée de déchets…

 

Beyrouth/Beirut, l’expo

 

Une exposition au sein de Beit Beirut était une évidence. Pas tant parce que le lieu arbore le nom de la capitale! L’édifice connu comme la Maison jaune ou Immeuble Barakat porte en lui la quintessence de ce qu’a subi Beyrouth pendant les sombres années de la guerre.

Dramatiquement située au carrefour de deux artères considérées comme stratégiques par les combattants et les francs-tireurs, l’élégante bâtisse de style néo-ottoman érigée dans les années 1920 s’est retrouvée la cible de tirs nourris. Au lendemain de la guerre, il ne restait qu’un immeuble fantôme dont la «dentelle de pierre» avait été façonnée par les innombrables impacts de balles et éclats d’obus.

 

Depuis que les villes de Paris et de Beyrouth se sont associées afin d’en faire un lieu de mémoire et de rencontres culturelles, Beit Beirut accueille entre autres événements des expositions d’art. Celle consacrée aux photos beyrouthines de Fadia Ahmad s’inscrit parfaitement dans cet esprit de résilience qui habite la Maison jaune.

Une petite centaine de «tableaux» seront dévoilés à partir du 20 septembre et pendant un mois selon une scénographie pensée par Pascale Le Thorel, également commissaire de l’exposition. Éditrice et critique d’art, Pascale Thorel a également signé les textes du catalogue de l’exposition. Un ouvrage qui permet de prolonger le plaisir de découvrir des photographies ne figurant pas dans l’exposition.

 

Rola Cusson

 

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